« Faites du sport, et vous serez heureux ! », telle pourrait être le slogan de toute affiche publicitaire digne de ce nom d’une quelconque salle de sport, à travers la promesse d’un corps aux courbes parfaites alors érigé comme garant de l’atteinte du bonheur et du bien-être.
Il serait de bien mauvaise foi que de vouloir critiquer pareil enthousiasme qui sans nul doute est porté par un réel élan de bonnes intentions. Il n’est plus à prouver – tant il existe d’études en ce sens, que la pratique régulière d’une discipline sportive a mille vertus extraordinaires pour notre corps ainsi que notre bien-être général. La pratique régulière du sport en France bat d’ailleurs des records, on a ainsi pu constater lors d’une étude statistique réalisée en 2017 qu’il y aurait environ 13, 5 millions de runners réguliers et 5,6 millions de personnes inscrites dans une salle de Fitness en France. Ces chiffres peuvent être interprétés comme des indicateurs plutôt conséquents de l’adoption du sport par les Français dans leur mode de vie et leur routine.
Ce constat n’a pas grand-chose d’étonnant dans une société contemporaine dictée par un culte omniprésent et obsessionnel du corps parfait, mais également – et de plus en plus, dans un contexte d’une génération prête à bouleverser les modes de vie et de consommation traditionnels. La génération Y, qui désigne les personnes nées approximativement entre la fin des années 80 et le début des années 90, est une génération « à vocation », souhaitant avant tout trouver un sens dans ses actions ou choix, cliente assoiffée du « healthy », en recherche permanente de mieux-être, mais toujours à travers une consommation responsable et une quête du durable.
Mais alors pourquoi, malgré ce retour à des valeurs fortes et une certaine forme de vénération du naturel et du mode de vie sain, est-il encore si difficile de trouver un engouement populaire similaire en ce qui concerne ce qu’on pourrait appeler le « sport de l’esprit » ?
Nous existons évidemment à travers notre corps, et il est tout à fait cohérent qu’une discipline soit appliquée aux facteurs permettant de contrôler la bonne santé du corps, qu’on pourrait appeler le « véhicule » de notre existence terrestre, à travers la pratique du sport et le choix d’une alimentation de qualité. Ces deux thèmes sont d’ailleurs très prisés des start-ups qui cherchent sans cesse des moyens d’innover dans ces domaines afin de répondre à un besoin croissant toujours plus assumé voire plébiscité des consommateurs d’atteindre le sacro-saint « healthy lifestyle » qui, plus marketé que jamais aujourd’hui, paraît promettre à lui seul bonheur et complétude de soi.
Mais dans cette précipitation à la course au bonheur et au bien-être, n’oublions-nous pas trop souvent une composante essentielle de notre existence? Peut-on réellement s’arrêter à considérer que le « véhicule » se satisferait d’un simple lavage de surface, aussi régulier soit-il, et d’un peu d’essence pour que sa durée de vie soit assurée dans la pérennité ? La réponse est bien évidemment non, tout véhicule nécessite un contrôle régulier, la vérification de l’état de ses différents sous-systèmes et le remplacement éventuel de pièces ou de liquides.
De la même façon, sans rentrer dans une quelconque forme de mysticisme obscur et incompréhensible, il conviendrait de nourrir et entretenir régulièrement l’esprit. Le corps seul ne constitue que la partie physique, matérielle et visible des êtres que nous sommes.
Cependant, alors même que les bénéfices liés à la pratique sportive ou à l’exigence d’une alimentation saine sont connus de tous et sont évidents, on peut être amenés à certaines réticences et se demander à quoi bon une discipline de l’esprit servirait ? Et, si on y trouve son compte, comment alors s’y prendre pour parvenir à discipliner et prendre soin de notre esprit?
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Teddy Riner déclarait lors d’une interview en 2017 : « mon point fort, c’est ma tête ! » Le décuple champion du monde de judo confiait ainsi que le secret de la réussite de ses exploits sportifs résidait dans tout le travail mental sur soi qui accompagnait le travail de préparation physique. La maîtrise de notre destin passerait donc par le travail et le contrôle de notre esprit, emportant des transformations fondamentales à l’intérieur de nous qui seraient la clé ultime de la « réussite ».
On comprend alors que l’objectif est de faire un travail sur l’esprit afin de changer les mécanismes, parfois inconsciemment imprégnés en nous, qui constituent des freins, qui peuvent se manifester à différents niveaux en fonction des individus et qui nous empêchent de nous réaliser et de nous sentir heureux. Et finalement, qu’y a-t-il de plus important que de passer du temps avec soi-même, qui, par l’ultra sollicitation permanente propre à nos sociétés contemporaines, devient finalement la personne avec qui on finit par passer le moins de temps ?
Pour réaliser ce travail, il y a évidemment les solutions qu’on pourrait qualifier de « classiques », telles que le recours à un psychologue ou tout autre spécialiste du corps médical. Néanmoins, et c’est d’une importance cruciale, nous avons tous au fond de notre être une capacité autonome, trop souvent ignorée, tout à fait naturelle, tout comme la capacité naturelle à faire du sport, de se défaire de nos complexes, de nos peines, de nos blocages, et plus généralement d’une grande partie de nos « problèmes » simplement en effectuant un travail mental de perception. C’est là que toute la notion de « sport » de l’esprit prend sens et corrélativement d’effort, effort portant sur la capacité à transformer son prisme de perception habituelle d’une situation. L’enjeu est d’atteindre un mieux-être par le seul élément sur lequel nous avons tous un contrôle : la transformation de notre vision, au lieu de la recherche habituelle de la transformation de la situation, qui en fonction des cas de figure peut être hors de notre portée.
Les méthodes et procédés, quant à eux, sont multiples et doivent convenir à chacun en fonction de sa recherche et de ses affinités. La lecture philosophique, la pratique de la méditation ou de la sophrologie, l’hypnose constituent des voies intéressantes. Le tout est de garder à l’esprit que sont énoncés là des moyens, qui convergent tous vers un seul et unique objectif : le bien-être et le bonheur à travers la conscience, l’écoute et la complétude de soi, l’alignement parfait entre ce dont on se ressent être en notre for intérieur et la vie que l’on vit.
Le « sport de l’esprit », tout comme le « sport physique » ou le choix d’une alimentation saine et équilibrée, ne saurait cependant offrir de résultats satisfaisants en l’absence de régularité et de discipline.
Alors, dès maintenant, pour vous offrir une existence profondément épanouie, riche, heureuse, sereine et consciente de tout ce bonheur, serait-il peut-être temps pour vous aussi d’accorder au vrai « vous », votre esprit, votre petite voix dans la tête, le temps et l’attention nécessaires pour son éveil, son élévation, son bien-être, autrement qu’à travers des attentions liées au seul soin du corps. À travers la méthode de votre choix, celle qui vous convient le mieux, vous avez en vous cette faculté endormie de guider votre âme, votre vie intérieure (la partie immatérielle de votre personne), vos pensées vers l’ultime bien-être, la sérénité, la paix intérieure, celle qui ne saurait être un eldorado promis par un quelconque publicitaire mensonger, celle qui n’est que difficilement acquise au prix de nombreux efforts, à la manière d’une épreuve sportive de haut niveau rudement préparée, et que seul vous-même par votre discipline et votre sagesse grandissante, vous aurez transformée en art de vivre.
Très bel article censé et profond et ô combien en phase avec l’air du temps