Pour son 37e film en tant que réalisateur, Clint Eastwood a donc décidé de raconter l’histoire du commandant Sully. Un pilote de d’US Airways qui le 15 janvier 2009 sauve près de 150 passagers en amerrissant le vol 1549 sur l’Hudson River. Un acte héroïque dont les États-Unis raffolent. Entre le biopic et le film catastrophe, Sully envoie malheureusement Tom Hanks à la limite du crash.
Sully débute de manière très impressionnante. Plongé de suite dans l’Airbus A320 du commandant Sully, on pense dès la première minute vivre la scène principale du film. Suite à une panne moteur, l’appareil perd peu à peu de l’altitude et commence à arriver à hauteur des buildings de Manhattan jusqu’au au moment où le célèbre pilote incarné par Tom Hawks ne peut plus rien faire. L’avion se crash en plein sur un gratte-ciel rappelant de sombres moments de l’Histoire. Heureusement, ceci n’est qu’un cauchemar qui va faire réveiller Sully. Reclus dans sa chambre d’hôtel, le commandant du vol 1549 attend dans le stress son audition devant la commission fédérale. Face à l’administration américaine, il devra justifier son choix d’avoir amerri sur l’Hudson River plutôt que de rejoindre l’aéroport de La Guardia. Une décision fort louable puisqu’il a réussi à préserver l’intégrité de tous ses passagers (une première historique dans un amerrissage).
Voilà comment débute le dernier film du réalisateur d’American Sniper et Million Dollar Baby. Pour raconter ce fait-divers marquant pour un pays qui a connu un certain 11 septembre 2001, Eastwood a décidé de déconstruire son histoire en choisissant une forme non linéaire par rapport au déroulement des faits. Ainsi, on jongle entre des scènes d’interrogatoire et le crash, le tout entrecoupées de quelques flash-back sur la jeunesse du commandant Sully afin de montrer la genèse de ce héros bien réel.
Car il n’est pas né de la dernière pluie, ce choix de mise en scène permet habillement à Clint Eastwood de tenir les 1 h 30 minimum du long-métrage d’aujourd’hui. Un tour de passe-passe qui fait qu’on revit à plusieurs reprises la scène catastrophe. Ceci laisse au final, une impression que le cinéaste a manqué cruellement de contenus pour réaliser Sully. On n’en arrive au point de se s’il était nécessaire de raconter cette histoire certes parfaite pour le cinéma hollywoodien, mais où il ne se passe pas grand-chose.
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Finalement, Sully permet à Clint Eastwood de continuer son travail sur ces véritables héros de l’Amérique d’aujourd’hui. Après American Sniper avec Bradley Cooper qui dézinguait du taliban à la pelle, le réalisateur de Mystic River met en scène une nouvelle fois une histoire très patriotique.
Outre un certain ennui lié à cette répétition décrite un peu plus haut, le gros problème de Sully vient aussi de sa portée politique. Républicain affirmé et soutien de Donald Trump, Clint Eastwood fait de ce film un objet de propagande des idées du nouveau Président des Etas-Unis. Un simple citoyen qui a juste fait son travail de pilote, mais qui doit quand même se justifier face à cette administration très bureaucratique que Trump n’a cessé de dénoncer au cours de sa campagne. Le cinéaste présente la commission comme une bande d’ignares qui ne voient pas plus loin que l’écran de leur bureau. À coup de petits détails (comme la présence de l’Association de la protection des animaux dans la commission d’audition), le réalisateur de 86 ans se paye à travers Sully l’administration publique de son pays.
Autre preuve que ce film est partisan, c’est sa gloire à l’Amérique blanche délaissée selon le parti Républicain. Vous ne verrez en effet dans Sully pratiquement aucun personnage noir. Une vision ahurissante pour un long-métrage américain de 2016.
Heureusement, Sully se sauve du crash total grâce à la prestation de Tom Hanks. Toujours impeccable, l’acteur de Seul au Monde ou Forest Gump se présente ici sous une facette encore jamais vue, mais incroyable de vérité. La performance de Hank est peut-être l’unique chose positive de ce film au final profondément ennuyeux et trop politisé. Il serait temps que les États-Unis comblent ce besoin de héros, Hollywood pourrait enfin changer de thématique.
Bonjour Pierre-Andrea,
J’ai lu votre article avec beaucoup d’attention.
J’ai vu le film, il y a quelques jours. Je le trouve particulièrement réussi.
Un des meilleurs films américains de l’année 2016.
Tom Hanks porte le film quasiment tout seul. Il est également très bien soutenu par Aaron Eckhart,
Maintenant, je n’ai pas vu le temps passer, et j’ai même envie de le revoir.
C’est un film qui rend hommage au capitaine Sully évidemment, et à tous ceux qui ont contribué au sauvetage des passagers. C’est un film qui dit aussi que New York a également connu des histoires qui finissent bien, et qui sont à contre-courant des attentats du 11 septembre 2001.
Le film est une ode au professionnalisme, celui du capitaine Sully en particulier.
Le film s’en prend à la bureaucratie, représentée ici par la NTSB.
De la part de Clint Eastwood, républicain et « libertarian » individualiste qui s’est toujours méfié des institutions étatiques, ce n’est pas étonnant. Le film L’Inspecteur Harry dénonçait déjà une bureaucratie envahissante, inefficace et bloquante.
Lier ce film à Donald Trump est trop facile, je pense. Même si l’analyse peut être intéressante.
Le tournage du film a démarré fin septembre 2015, à un moment où il restait tout à faire pour la campagne électorale américaine.
Si Hillary Clinton avait été élue, auriez-vous eu la même approche du film ?
Par ailleurs, je ne vois pas en quoi il est pertinent de déclarer que dans ce film, il y a peu de personnages
afro-américains ou issus de minorités ethniques.
Surtout quand on regarde bien la filmographie de Clint Eastwood.
Même si la question raciale est évidemment très sensible aux Etats-Unis.
Dernière question: quels sont les films de Clint Eastwood que vous aimez ?
Cordialement,
Hocine