Après s’être orienté vers le documentaire avec des chefs-d’œuvre du genre tel que Grizzly Man et Into The Abyss, Werner Herzog est enfin de retour à la fiction avec Salt and Fire. Pour son nouveau long-métrage, le cinéaste allemand de 74 ans embarque Michael Shannon, Gael Garcia Bernal et Veronica Ferres en Bolivie pour une « rêverie qui ne suit pas les règles du cinéma classique » (selon les dires de son auteur). Beau et envoûtant, Salt and Fire est un film inclassable.
Amoureux des grands paysages, comme il a pu nous le prouver au cours de son parcours de documentariste, Werner Herzog a choisi de situer Salt an Fire en Bolivie sur le plus grand désert de sel au monde, le Salar d’Uyuni. Si ce n’était pas le premier choix du réalisateur (il voulait au départ tourné en mer d’Aral comme dans la nouvelle de Tom Bissel dont il s’est inspiré), cette vaste étendue blanche est un personnage à lui toute seule. Tout au long du film d’Herzog, elle saura se faire attendre, détester et à la fin aimer. Dans Salt and Fire, ce désert de sel est aussi la conséquence d’une terrible catastrophe écologique (fictive). C’est ainsi la raison pour laquelle trois scientifiques partent sur place constater les dégâts, mais à peine arriver en Amérique du Sud, ils se feront prendre en otage par le PDG de l’entreprise responsable de ce désastre.
Salt and Fire se décompose en deux parties. La première est consacrée à l’enlèvement et à la rencontre entre la délégation scientifique emmenée par Veronica Ferres et Gael Garcia Bernal et ses ravisseurs dont Michael Shannon qui interprète ici le PDG, en est le leader. La seconde est beaucoup plus déroutante puisqu’elle embarque Ferres et Shannon sur le Salar d’Uyuni pour un enfermement qui est cette fois-ci est très différent. La scientifique y est laissée en plein désert avec deux enfants quasi aveugles. Au cours de ces quelques jours, ils devront apprendre à vivre loin de tout.
Déconcertant, Salt and Fire est qualifié « d’imprévisible » par son propre réalisateur qui voulait à travers de ce film construire quelque chose de très différent par rapport au cinéma hollywoodien plus classique. Au cours des 1 h 30, Werner Herzog arrive à chaque fois à nous surprendre et à nous dérouter à ce qu’on à l’habitude de voir dans le déroulement d’un récit cinématographique. De la prise d’otage qui se transforme en discussion philosophique à cette fin où le cinéaste semble retrouver son âme d’enfant en jouant avec la parfaite planitude de son décor, Salt and Fire à la volonté de vouloir changer notre regard sur le monde, mais aussi sur notre existence.
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Werner Herzog tente donc à nous réapprendre à penser, à voir, mais également à comprendre et ceci doit passer par un retour à la nature (les nouvelles technologies y sont d’ailleurs très critiquées). Il nous incite à prendre conscience de la beauté de notre planète et surtout à la protéger. Au passage, on note que Michael Shannon est toujours aussi impeccable. Vu cette année dans Midnight Special de Jeff Nichols, il prouve qu’il est sans doute l’un des acteurs les plus brillants actuellement.
Qualifié de thriller par la société distributrice, il semble très compliqué de classifier Salt and Fire. Un OVNI cinématographique puissant, intrigant et magnifique qui signe de la plus belle manière le retour d’Werner Herzog à la fiction.
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