Invincibilité, accidents familiaux, trou d’air, alcoolisme, dépression… À 33 ans, après avoir traversé les abysses de l’enfer dans une carrière forte en émotions, Peter Barrett a signé à l’UFC en août dernier. Interview d’un combattant dont le rêve est en train de se réaliser en lightweight. Entretien en long, en large et en travers.

Fin août, tu as obtenu un contrat à l’UFC après une victoire par décision unanime contre le Coréen Sang Hoon Yoo, aux Dana White’s Contender Series. Dans le premier round de ce combat, c’était difficile pour toi. Tu as évité de peu une soumission. Et dans les rounds suivants, tu as repris le dessus sur ton adversaire. Comment expliques-tu cette force de caractère chez toi ?

Oui, le premier round était très dur. Il a commencé très fort et il avait ce regard qui ‘essayait de m’achever’. Vous savez qu’il a fallu beaucoup de cœur pour résister à cette tempête et la traverser pour revenir ; et commencer à reprendre le contrôle à la fin du premier round. Puis lors des deux autres rounds, j’ai dû dicter la direction du reste du combat.

Quelle a été ta première sensation lorsque tu as appris ton entrée à l’UFC ?

Quand ils ont annoncé que j’obtenais un contrat, c’était comme un rêve qui se réalisait. C’était les dix dernières années de travail acharné qui se sont finalement concrétisées, une validation extrême pour tout le travail acharné et les sacrifices que j’ai consentis pour ce sport. Mon combat aux DWCS était une occasion vraiment spéciale. Il y a dix événements au cours de l’été et dans chaque événement, il y a dix combattants. Chaque combattant se bat non seulement pour gagner le combat, mais pour gagner un contrat à l’UFC. J’ai obtenu un contrat de 4 combats. Cela dépendait évidemment de la victoire. Si je gagne le premier combat, j’ai le second combat et si je le gagne, j’ai le troisième et ainsi de suite… Puis on renégocie et on commence à combattre les meilleurs gars au monde.

Tu avais raté d’autres occasions de rejoindre l’UFC il y a quelques années, en perdant des combats importants. As-tu douté à un moment donné ? Comment t’es-tu préparé psychologiquement à cet événement ?

J’ai perdu quelques gros combats et vous savez, nous avions fait un gros travail de préparation mentale, de visualisation. Nous avions tout répété avant l’événement, passé du temps dans la gestion des émotions comme si j’avais obtenu le contrat. Donc je ressens non seulement les émotions de la victoire, mais aussi celles de voir l’annonce du contrat. J’ai aussi passé beaucoup de temps à faire de la boxe d’ombre et à visualiser le combat en avance, en jouant différentes variations, que ce soit en restant debout ou en allant au sol juste pour que je sois à l’aise ; histoire de ne pas être surpris. La préparation mentale est donc un aspect important du combat et elle me prépare à tout dans cette situation. Il y a eu des nuits où Dana White ne donnait pas de contrats et il y a eu des nuits où il donnait cinq contrats.

Ce n’est pas parce que vous y allez et que vous gagnez que vous allez forcément obtenir un billet pour l’UFC. Il y a eu une soirée cette saison où Dana White félicitait tous ceux qui avaient gagné, puis se retournait et leur disait qu’aucun d’eux ne répondait à ce qu’il cherchait. Donc c’est vraiment une preuve de la quantité de travail que vous devez mettre en oeuvre et du niveau que vous devez montrer, non seulement dans la performance sportive, mais aussi dans la capacité à toucher son concurrent. C’est une rare occasion et même après avoir réussi à signer un contrat, le plus dur reste à venir, car il faut faire le spectacle pour eux.

Quels sont les points sur lesquels tu dois progresser pour être encore plus fort à l’approche de l’UFC ?

Ce combat était en lightweight, à 155 livres (NDLR : moins de 70,3 kg). Avec le contrat que nous avons obtenu, nous avons la possibilité de passer dans la catégorie featherweight à 145 livres. Donc je serai un plus grand adversaire, plus fort. Cela me donnera un avantage de taille et un avantage de puissance. Mais les choses sur lesquelles je vais me concentrer sont plutôt les bases, les techniques de perforation. Il faut que je sois très discipliné dans ma position. Et être très discipliné, c’est d’abord m’assurer que mes mains reviennent. Il faut aussi que je travaille ma mémoire musculaire. Mais aussi, il faut que je m’appuie sur mes principes fondamentaux en profondeur, et commencer à m’amuser un peu plus pour être créatif avec.

Entre 2017 et 2018, tu as perdu tes 3 premiers combats (3 défaites sur 4 oppositions). Une période où tout n’a pas été facile pour toi. Tu es tombé dans l’alcool et la dépression, puis tu t’en es remis. Comment as-tu fait ? Qui t’a aidé ?

Oui, je veux dire que j’ai eu une carrière très réussie jusqu’à 8-0. Au moment où j’ai perdu mon premier combat, j’ai aussi perdu mon petit frère. Il est mort d’une surdose accidentelle de drogue. C’est ce qui circule dans cette région, et beaucoup de gens se font avoir. Ce sont comme de fausses pilules d’opiacés par l’héroïne et ça provoque de véritables tragédies. C’est vraiment bon marché, c’est vraiment fort, et il n’en faut pas beaucoup pour être touché. J’ai donc perdu mon premier combat un mois plus tard, j’ai perdu mon frère.

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Deux mois après, mon père a eu une crise cardiaque et c’est moi qui l’ai trouvé mort sur son canapé. Grâce à la thérapie, à des objectifs fixés, au fait de me montrer, d’essayer de faire de mon mieux et de croire en moi, j’ai pu remonter la pente. La thérapie a vraiment aidé. Ma mère et ma petite amie m’ont aidé à suivre cette thérapie. J’étais très hésitant au début, mais une fois que j’ai fait quelques recherches et que j’ai trouvé un thérapeute avec qui j’ai résonné, il m’a été beaucoup plus facile de m’ouvrir. Grâce à cette personne, j’ai pu travailler sur certaines des choses que j’avais entravées en raison de ces tragédies.

Tu as 33 ans, tu as fait 9 combats en lightweight et 2 en featherweight. Quelle est ta vraie catégorie ?

J’ai fait un tas de combats avec un poids de 150 livres (NDLR : environ 68 kg), alors j’ai fait des allers-retours entre les deux catégories de poids. J’ai déjà eu des problèmes avec des adversaires plus grands ; j’ai lutté un peu avec mon adversaire ce soir-là aussi (NDLR : Yoo, lors des DWCS). Et il y a deux autres combats où j’ai affronté des gars plus grands, où j’ai eu un vrai problème pour passer leur allonge.

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La catégorie lightweight est très difficile avec la présence de grosses pointures (Khabib, Poirier, McGregor, Ferguson, Gaethje…). Quelles sont tes ambitions à l’UFC ?

L’UFC est mon rêve. C’est une nouvelle étape de ma carrière qui s’ouvre. Aujourd’hui, j’ai 33 ans, je pense qu’il me reste encore 3 ou 4 ans en moi. On vient de voir Glover Teixeira qui a 40 ans et qui s’est battu il y a peu (NDLR : victoire du brésilien par décision partagée face à Nikita Krylov lors de l’UFC on ESPN+ 16). Donc il y a des gens qui poursuivent tard. Je suis un grand fan des New England Patriots et Tom Brady, à 40 ans, est toujours l’un des meilleurs quarterbacks de la NFL. Il existe donc des manières de gérer sa santé et sa nutrition pour prolonger notre longévité dans ces sports. Pour avoir une carrière plus longue.

Ton surnom est « Slippery » (NDLR : en français, « Glissant »). Pourquoi ? Cela veut-il dire que tu enchaînes les dérapages dans ta vie ?

Oui ! Donc ce surnom s’apparente à la façon dont j’ai chassé les femmes tout au long de ma vie. J’étais toujours ici et là, et j’étais motivé par les femmes.

Il y a encore quelques années, tu étais barman en dehors de l’octogone… Est-ce encore le cas aujourd’hui ? Tu arrives à combiner les deux ?

Je ne suis plus barman, mais maintenant j’ai des clients avec qui je travaille régulièrement en privé tout au long de la semaine. J’ai donc commencé à bâtir ma propre entreprise pour pouvoir travailler pour moi-même et passer plus de temps à me concentrer sur mon sommeil. Parce que le fait de travailler la nuit et d’avoir un bar détruit mes habitudes de sommeil et cela rend la récupération beaucoup plus difficile.

À l’UFC, quel est le combattant que tu aimerais affronter ?

J’ai un peu honte de ne pas avoir de réponse toute prête… Je n’ai pas vraiment de préférence. Je veux juste me battre avant la fin de l’année et peu importe qui sera cette personne. Je ne pense pas qu’en vertu de mon contrat, je puisse dire que je veux me battre contre tous ces hauts gradés parce qu’on me paie quand même une petite somme d’argent. Je veux me battre contre les gars du bas de l’échelle et empocher de l’argent. Puis quand viendra le temps de me battre contre les meilleurs, j’aurai la possibilité de gagner plus d’argent.

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