Presque quatre années après The Immigrant, James Gray revient en salle avec un projet de taille : The Lost City of Z, probablement son travail le plus ambitieux. Se détournant habilement de ses décors new-yorkais habituels, il tente de conserver ses thèmes de prédilection à travers le personnage principal de ce grand film d’aventure.
Début du XXe siècle, le colonel britannique Perceval Fawcett, victime du complexe de classe, cherche à gravir les échelons de la hiérarchie militaire. On lui propose finalement une longue expédition en Amazonie afin de dessiner la frontière officielle, source de discordes, séparant la Bolivie du Brésil. Malgré un premier voyage éprouvant loin de sa famille, ce jeune père a du mal à cacher son désir de repartir, persuadé d’avoir découvert la trace d’une cité perdue légendaire.
Loin d’une action outrancière, le film se révèle intimiste, traversé par quelques morceaux de bravoure capturés avec soin. De ces décors naturels majestueux, le cinéaste donne naissance à une œuvre dense, académique, mais tout en maîtrise, divisée entre ces voyages éprouvants et des retours au foyer difficiles. Ici, l’intrigue est souvent mentale et frôle parfois la folie, rendant hommage à Coppola et Apocalypse Now dans cette figure de soldat à la dérive sur son radeau, entre raison et hallucination, dévoré par la mission qu’il s’est fixée. En tête d’affiche, Charlie Hunnam est habité et se surpasse, Robert Pattinson interprète avec brio son aide de camp désabusé, et Sienna Miller toujours juste dans ce rôle d’épouse délaissée, mais compréhensive.
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En adaptant ce destin hors du commun, Gray rejoint les obsessions de la plupart des personnages de sa filmographie : un besoin de reconnaissance pathologique au détriment d’une vie de famille. Cette ambition maladive, à la fois respectable et déchirante, le fera s’enfoncer dans la jungle à maintes reprises, à la recherche de cette civilisation primitive. Au grès de ses explorations, de ses rencontres, il découvrira peu à peu l’aberration du colonialisme ambiant.
D’une beauté renversante, The Lost City of Z réaffirme le talent du réalisateur américain pour raconter des hommes obstinés, en avance sur leur temps. S’imprégnant des codes du genre, ce sixième long-métrage est proche de l’expérience sensorielle tout en gardant la pudeur indissociable du cinéma de son auteur. Par DamiGn
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