Chronique XEU – Et Vald devint génial

Le buzz autour du nouvel album de Vald était immense, monté en épingle autant par Trophée et Désaccordé, les premiers extraits de Xeu, que par l’intelligence marketing du rappeur. Pochette blanche immaculée, planète rap sur Skyrock et faux leak, la foule ne pouvait qu’être impatiente d’écouter Xeu le 2 février (dispo en CD ici) !

Digérer Agartha

En janvier 2017 sortait le premier album de Vald, nommé « Agartha » après d’innombrables EPs ayant marqué les amateurs de rap français, techniques et déjantés. Nouvellement signé chez la major Capitol, Valentin avait alors acquis une réputation auprès du grand public principalement grâce à sa folie et ses mimiques. Il était sorti du laboratoire avec son lot d’expérimentations : la farce « Eurotrap », le faussement mignon « Selfie » ou le décomplexé « Strip ». Un album qui part dans tous les sens, sans cohérence, tant musicale que thématique. Attention, ce n’est pas une critique, car c ‘est quelque part devenu la signature de Vald : n’en avoir rien à foutre de tout et passer d’une ambiance à une autre d’un claquement de doigts. L’homme est qualifié de génie par ses fans hardcore, de clown par ses détracteurs.

Le mélange a opéré

Écrit en solo dans sa chambre pendant l’été, Xeu a été bien plus facile à enregistrer que Agartha. D’un jet, Vald a peint son état d’esprit du moment. Si sa folie n’est pas altérée en témoigne le début d’album où il nous emmène aux portes de l’enfer, le personnage est moins cartoonesque. Le propos est lui aussi plus profond. Tout au long du disque, il parle en filigrane de son rapport difficile à sa gloire naissante, avec un recul remarquable : « tout le monde me suce personne ne m’aime, je commence à m’y faire » ou « mes seuls amis travaillent à Capitol ».

Un autre homme essentiel à la création du projet : Seezy. C’est lui qui produit 95% des morceaux et nous livre des prods légendaires que Vald s’approprie parfaitement, donnant à l’album une couleur moderne, mais propre à l’univers de Sully. S’il était déjà présent sur le projet précédent, il joue presque un rôle de directeur artistique sur Xeu : « Avec Seezy on a pour projet de faire de la musique qui accompagne les gens tous les jours, H24. » répondait-il à l’abcdrduson récemment.

View this post on Instagram

Xeu a donc été abordé différemment. Moins de sons expérimentaux, plus de maîtrise. Vald comprend l’importance des silences dans la musique, s’adapte à l’instru pour inventer de nouveaux flows.

Rassurez-vous, Vald n’est pas devenu un rappeur chiant et balance toujours des phases incisives avec un naturel déconcertant : « Y’a plein d’trucs dans ton cul qui n’devrait pas y être comme matraque de CRS », « Arrêtez d’imprimer des notices, nous ne les lisons pas ». Les délires sont toujours présents, mais se fondent dans un album parfaitement séquencé. Quand Fianso entre dans le délire de Vald, que celui-ci bute un fan, qu’un son électro n’est pas déplaisant, qu’il se livre en profondeur et que les 17 titres passent à une vitesse folle, on peut dire que l’album est une réussite.

Devenir génial en simplifiant sa musique, le pari de Vald sur Xeu s’avère payant.

Par Simon V.