Nous sommes quelques heures après la sortie du nouvel album de Kôba Building un vendredi de la mi-mars 2018. La veille en déroulant mon fil d’actualité, j’étais tombé sur son post sur instagram où il annonçait l’imminence de la sortie du fameux projet.

Depuis la découverte de Kôba Building sur l’excellent « Criminel au Mic » en 2008, je suivais régulièrement ses sorties, lorsqu’il a posé ses valises en France, j’ai moins entendu parler de lui, alors le fait d’apprendre qu’il sortait un album créait en moi une véritable excitation. D’origine gabonaise, Kôba Building fait partie de l’élite du rap africain depuis 2005, une star incontestable et respectée dans son registre en Afrique, un rappeur très authentique et dont j’appréciais le caractère cru et spontané. 

Vers 23 H, je suis plongé dans mes révisions lorsque je décide d’un petit break. J’ouvre Spotify, je vais sur le profil de l’artiste, j’ouvre « Black Roses », le nom du projet, je suis absorbé dans l’univers du Ghetto Building !

Logiquement on passe par l’intro, c’est énergique, c’est frais, dès les premières minutes tu es aspiré dans l’univers d’un gangster rappeur qui a les pieds sur terre et qui a les yeux ouverts sur la réalité de la société. Les 4 minutes du titre Black Roses sont posées en guise d’introduction de l’album, l’instrumental est très solennelle autant que les voix rauques de fond, et le rappeur n’y vas pas tendrement d’entrée, il lâche des couplets saccadés assortis de rimes crues et très imagées, un mélange de paroles dénonciatrices, de colère, mais aussi des airs détachés dans le style du rappeur fou et lourdement égotrip qu’il est. « Je reviens des abîmes, je dis ce que tu ne vois pas, le Diable s’habille en slim, je dis ce que tu ne crois pas » ou « Je suis la rose noir ténèbre, le jeune noir célèbre, ma rime t’enterre tu peux m’appeler pompes funèbres », les quelques punchlines qui ont frappé mon esprit, tu vois un peu déjà où le rappeur veut amener son auditoire avec le concept « Black Roses » utilisé pour baptisé son album. J’ai accroché dès le premier morceau, je continue sur le second morceau « 10 ans ».

C’est l’un des autres morceaux fortement égotrip comme Encore ou Kwata : « Suis venu pour faire du sale, on en reparlera dans 10 ans », le message est clair pour ceux qui pensait que le rappeur avait disparu de l’univers du rap, il est là pour s’éterniser et fidèle à son registre après plus de 10 ans dans le rapgame. Kwata est une réponse à l’appel à le revoir sur scène, tout est dit dans le refrain, « Le ghetto m’a dit, Building où t’es passé, viens nous aider ici y’a que des bras cassés, j’ai répondu en disant j’ai quitté le Kwata, les gars font du n’importe quoi, ils parlent de concurrence, mais moi je ne les vois pas, ils ne font pas le poids ». Des phrases assez sévères tout comme « Les artistes sont presque tous à la débauche, rien dans les rimes, rien dans les poches », il donne le ton dans un style dynamique, comme un « King » de retour pour récupérer son trône et donner des leçons. J’ai mis un point spécial au titre Généraux, hommage à sa génération, mais dans une ambiance assez décalée et rétro, le genre de son que tu écoutes pour finir ta soirée ou vider ta bouteille de whisky.

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Le titre « Imane » c’est le genre de musique dont tu écoutes à la fois l’instrumental et la voix du rappeur. La prod est dans la même ambiance que celle de « Black Roses », des voix féminines en fond qui ressort cet air solennel et prophétique. Lorsqu’il kicke, Koba fait plus penser à un prophète des temps modernes, il parle de sa vie, de sa vision africaine, de ses émotions et ressort le lien étroit entre son vécu et les vices de la société. « L’orgueil rend les frères faux, fils de conquérant j’ai vite appris à battre le fer chaud, en plein dans l’ordre nouveau, vu que le borgne règne et fait faner les roses ». Entre ses rimes riches et crues, il balance ses vérités, son style sur Imane est plutôt évocateur d’un message qu’il vient porter à sa génération en s’érigeant en donneur de leçon ou en activiste comme sur « Diversité », « Y’a pas que sur un piano que le noir se mélange au blanc ». Le rappeur est dans un registre où il porte aussi un message de paix et d’amour.

C’est un album éclectique qui aborde plusieurs thématiques, un délire égotrip, mais aussi un point de vue vis-à-vis de l’amour, de la diversité et du traitement des peuples africains. Depuis c’est un rappeur qui développe une conscience pour le peuple et même s’il est égotrip, il a ce côté engagé sur lequel il met l’accent sur ce projet spécialement. Depuis son single « Odjuku », il avait manifesté son mécontentement envers la politique et le traitement du peuple dans son pays le Gabon, ici son message est plus large, unité, appel aux jeunes africains à la lutte, le franc CFA, dénonciation de la servitude africaine à travers des chansons comme « Négus », « Mister Mille Flow » ou « Kemi Seba » en hommage au leader africain.

À la fin de l’écoute de cet opus de 16 titres, je me rends compte du véritable chef-d’œuvre de l’artiste, une œuvre envoûtante qui arrive à sonner très actuelle et consciente sans adopter un style engagé. La profondeur des titres, la musicalité et la qualité des instrumentaux, les voix, il y a mis tous les ingrédients, les collaborations étaient également au rendez-vous avec des artistes comme Gyovanni, Neïla, Don Nakess et Appollon, un projet disponible à l’écoute sur Itunes. En tant que légende du rap gabonais et africain, il montre le visage d’un rappeur qui n’a rien perdu, plutôt le projet est très mature, il nous entraîne dans un tourbillon d’émotions où il parle aussi de faits du quotidien, d’amour et de problèmes de couple sur les morceaux comme « Saurais-tu me pardonner » ou « Faire le vide ». Ce dernier est le prochain morceau dont Kôba Building annonce déjà le visuel dans un peu, une balade musicale accompagnée de Don Nakess et Appollon sur laquelle il relate les moments difficiles de couple où un moment d’évasion s’impose. En attendant cette nouveauté, appréciez le clip du titre « 10 ans » de Kôba Building ici : 

Par Jude B.

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